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août 20, 2010 - Catégorie :

Deuxième partie, chapitres 103 à 112

Musil, chapitres 103 à 112

20 août.

Chapitre 103.

Étrange conversation entre Ulrich : comme toujours, des répliques très abstraites sur l'homme et l'univers, dont l'articulation est souvent difficile à percevoir, mais aussi un relation complexe et difficile à appréhender entre les deux personnages : Ulrich, en particulier, semble troublé par Gerda et perd interieurement son cynisme habituel en se retrouvant, face à une jeune femme rebelle, comme le porte-parole (sophistiqué et porté aux propos paradoxaux, mais porte-parole tout de même en fin de compte) de la morale et du bon sens bourgeois.

J'ai lu quelque part que l'abondance des dialogues théoriques nuisait à la consistance des personnages : c'est tout à fait faux, Ulrich existe en dépit de toutes son intelligence et de tous ses discours.


Chapitre 104.

Humour de Musil. Rachel, servante de la très belle Diotime, a l'occasion d'examiner les affaires personnelles d'Arnheim, très riche ami de Diotime, et s'émerveille devant le raffinement de vêtements et d'objets plus précieux que ceux de sa maîtresse. "Rachel commençait à se sentir fatiguée lorsqu'elle fit, tout à coup, une constatation singulière. Elle se souvint très précisément que des choses assez semblables étaient apparues malgré tout depuis quelque temps dans la lingerie et les affaires de Diotime. Elles n'étaient ni aussi nombreuses, ni aussi précieuses que celles qu'elle voyait ici, mais si on les comparait avec la simplicité austère qui avait précédé, elles étaient plus proches, sans nul doute, du spectacle qu'elle avait sous les yeux que du sévère passé. Alors, Rachel s'ouvrit à l'abominable supposition que les rapports qui unissaient Arnheim et sa maîtresse étaient peut-être un peu moins intellectuels qu'elle ne l'avait cru.

Elle rougit jusqu'à la racine des cheveux.

Ses pensées n'avaient pas effleuré ce domaine depuis qu'elle était en service chez Diotime. Ses yeux avaient absorbé la magnificence du corps de sa maîtresse comme un comprimé dans un papier, sans y associer aucune réflexion sur l'usage de cette magnificence."


Chapitre 105.

Arnheim est un penseur de la modération.


Chapitre 106.

La manière dont Musil, page après page, non pas décrit un personnage mais s'immerger dans ses pensées et les présente d'une manière propre à ce personnage, chacun ayant non seulement un certain type de pensée mais aussi une manière à lui de les parcourir (pensées très abstraites et souvent paradoxales mais éparses et sans esprit de système pour Ulrich, pensées modérées et bien architecturées, plus faciles à suivre pour Arnheim, esprit moins froid et moins profond de Diotime, un peu fou de Clarisse, désordonné de Moosbrugger...) me fait penser qu'en réunissant dans des volumes séparés l'ensemble des chapitres consacrés à chacun des personnages et en les mettant à la première personne, on aboutirait à un système proche de celui des hétéronymes de Pessoa, qui a fait le même effort pour entrer dans des personnalités différentes au point de se les assimiler (alors que Proust, lorsqu'il présente les personnages les plus variés, conserve toujours le même style et s'en tient à la fiction du Narrateur qui saurait par quelque moyen comprendre ou deviner les pans les plus intimes des personnalités qu'il fréquente).


La division du travail comme caractéristique de la modernité : voir le bas de la page 641.


Chapitre 109. 

Curieux chapitre centré en principe sur Bonadea, mais qui passe à des réflexions sur la modernité et la "Cacanie" (surnom de l'Autriche-Hongrie) que l'on ne peut lui attribuer. Le fil rouge est sans doute la fragilité des attitudes : fragilité de Bonadea qui ne peut reconquérir Ulrich et se sent désarmée face à Diotime, fragilité de chaque homme qui "adopte son système particulier" et artificiel d'objets et de représentations qui lui permet de conserver sa sérénité dans le monde. "La cause de toutes les grandes révolutions, cause plus profonde que leur prétexte, n'est pas dans l'accumulation de circonstances intolérables, mais dans l'usure de la cohésion qui favorisait la satisfaction artificielle des âmes."


Chapitre 110.

Style toujours alerte, toujours prêt à bondir vers des perspectives totalement inattendues. Les exemples, en particulier, surprennent souvent.

"La vérité (...). Sans elle, même le fameux passereau ne peut pas tomber du toit. Le soleil, le vent, la nourriture l'y ont conduit, la maladie, la faim, le froid ou un chat l'ont tué ; mais tout cela n'aurait pu se produire sans l'existence de lois biologiques, chimiques, sociales, etc."


Chapitre 111.

Nouvelle réflexion sur la responsabilité des criminels, à travers les débats du comité pour la réforme du Code pénal (dont les débats retrouvent le caractère  brouillon des travaux de l'Action parallèle). Comment attribuer une qualité (celle de criminel, et la peine qui va avec) à un homme ?

Posté par thbz à août 20, 2010 09:42 PM

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